L’annonce ce matin par Petroplus confirme le mépris des dirigeants de cette société vis-à-vis de leurs salariés et des pouvoirs publics en général. Au mépris de toutes les règles imposées au droit à l’information du comité d’entreprise, l’annonce est parvenue par les médias, comme d’ailleurs cela avait été le cas la veille du jour de l’an pour annoncer l’arrêt de la production faute de crédit pour acheter du pétrole brut.
Mais pouvions nous attendre un autre comportement, lorsqu’on examine l’évolution de la société ces dernières années.
Les fermetures de raffineries Pétroplus étaient programmées.
La chute de Pétroplus Holdings, basée à Zoug, et la fermeture de certaines raffineries dont Petit Couronne, étaient programmées dans le milieu pétrolier.
Les chiffres parlent d'eux-mêmes: l'Europe compte 115 raffineries, et les surcapacités de production en essence sont estimées à 15 %, à cause de l'inadaptation de nombreuses raffineries construites pour produire deux fois plus d'essence que de diesel. Alors qu’aujourd'hui, il s'écoule trois fois plus de diesel que de sans plomb. Résultat, il faut importer du diesel, cette situation aurait dû faire réagir l’état afin de réduire cette dépendance. Le milieu pétrolier est resté inactif également sur cette question et n’a pas cherché à adapter nos raffineries à la demande.
Pétroplus qui ne fait que du raffinage, contrairement à BP, Exxon Mobil, Shell ou Total, actifs également dans l'exploration-production et dans la vente dans les stations-services, est donc la société la plus fragile. Mais tout cela laisse rêveur en regardant l’évolution de cette société Pétroplus implantée d’abord au Pays Bas, comme Shell.
Si les travailleurs subissent, tout le monde n'est pas perdant, à commencer par le groupe américain Carlyle.
Qui est derrière Pétroplus
D'abord hollandaise, créée en 1993, cotée à la Bourse d'Amsterdam, Pétroplus est rachetée en avril 2005 par le fonds d'investissement Carlyle pour 825 millions de francs suisse. (Le groupe Carlyle est surtout célèbre grâce à ses principaux investisseurs et conseillers. Cela va de George H. W. Bush, ancien président des Etats-Unis, à Franck Carlucci, ancien directeur-adjoint de la CIA, en passant par Olivier Sarkozy, le demi-frère du président français, actuel patron des services financiers du groupe. Sans oublier Shafig Ben Laden, le demi-frère d'Oussama Ben Laden).
En 2006, Carlyle retire Pétroplus de la Bourse d'Amsterdam, domicilie la société à Zoug et l'introduit à la Bourse de Zurich. L'opération est menée par l'UBS, le Crédit Suisse et Morgan Stanley.
C'est la plus belle entrée en Bourse depuis 2001. Carlyle empoche 3,13 milliards de francs suisse.
Les raisons de ce succès financier ? Les deux grandes banques suisses font le forcing pour proposer des actions Pétroplus à leurs clients. Et la presse financière n'est pas avare de compliments vis-à-vis de cette société, on peut même lire que Petroplus va «profiter du manque de capacités de raffinage pour assurer sa croissance».La suite est connue: Pétroplus se retrouve rapidement dans les chiffres rouges. Mais Carlyle s'en lave les mains. Le groupe s'en est mis plein les poches.
La pluparts des informations ci-dessus ont étés publiées par Ian Hamel le 19 janvier 2012, dans le journal GHI le plus lu de Genève.